Mon ouvrage se veut une réflexion sur notre histoire et cette réflexion est d’ordre philosophique ; en d’autres termes, ma réflexion relève de la philosophie de l’histoire. L’histoire humaine est toujours interprétée afin de découvrir son sens, sens au sens de direction et de signification. Les gens se posent les questions suivantes : Avec tout ce que nous vivons, allons-nous ? Quelle est la signification de tout ce qui arrive et nous arrive ? En outre, les gens cherchent ou s’interrogent sur le moteur de l’histoire : Qu’est-ce qui fait que les choses se passent ainsi et non autrement ? Autrement dit, quel est l’élément explicatif qui fait que notre histoire (monde) suive cette trajectoire et non une autre ? Par ailleurs, l’on cherche à découvrir les vrais acteurs de notre histoire : Qui est le sujet de l’histoire ? Qui sont les vrais acteurs de tout ce qui se passe dans l’histoire (monde) ? Sont-ce les hommes ? Est-ce Dieu ? Est-ce un être mystérieux comme l’Idée ou la Raison ? Est-ce la Nature ?

À la différence de l’animal, l’homme cherche à réfléchir sur sa propre vie, sa propre histoire.

À mon humble avis, chaque philosophie de l’histoire est aussi une narration du monde. Or le Matérialisme historique, la Mondialisation, l’Altermondialisme et la Postmodernité sont quatre optiques actuellement très en vues pour comprendre le monde. Après avoir pris acte de cela, je prends position en pensant que les approches actuellement disponibles ont toutes vieillies. C’est pourquoi, je propose une cinquième narration du monde, que j’appelle volontiers le Prosôponisme, et comme on reconnaît un philosophe, selon Deleuze, par des concepts, ce néologisme de ma plume exprime l’importance accordée à la démocratie participative.

Mon intention est claire et importante. Jusqu’à récemment, on avait  souvent essayé de réagir au capitalisme en se fondant sur le Matérialisme historique qui est la conception matérialiste de l’histoire. Cette narration du monde est née dans le contexte dominé par la Modernité prônant l’idée de progrès et prêchant l’universalisme qui correspond à l’uniformisation. L’idée de progrès entraîna la révolution scientifique qui portera des fruits dont la révolution industrielle. De la sorte, la Modernité transformera la vie sociale (naissance des inégalités), la pratique économique (commerce international, apparition de la bourgeoisie et du prolétariat) et la pratique politique (démocratie, colonisation). Karl Marx, appuyé par son ami fidèle Friedrich Engels, combattra ce monde capitaliste ayant un mode de production propre à lui. Révolutionnant les forces productives, la bourgeoisie bouleverse, par la même occasion, les rapports sociaux. C’est ici que se situe le moteur de l’histoire : la lutte des classes ne constitue pas le moteur de l’homme comme le pensait Louis Althusser et quand bien même Lucien Sève donnerait aux rapports de production un rôle décisif et aux forces productives un rôle fondamental, il resterait toujours vrai que ces deux "nécessités" sont unies au sein du mode de production et leur contradiction constitue le moteur de l’histoire.

Comme le capitalisme libéral entraîne un cortège de malheurs, il y a la nécessité de le remplacer par un autre régime et c’est au prolétariat que Marx-Engels confient cette mission. Ainsi l’alternative communiste sera proposée avec son nouveau mode de production et de gestion politique. Règne de la liberté, le Communisme est la fin de la préhistoire et le début de l'histoire, car c'est seulement dans le monde communiste que les hommes seront les sujets de leur propre histoire. Voilà ce que d’aucuns ont appelé le métarécit marxien. Pour le sauver, on est venu à parler du socialisme réel. Et pourtant, les temps ont changé : les vieux remèdes ne semblent plus appropriés. Si le contexte actuel n’est plus celui dont parlent Marx et Engels, il faut donc trouver une autre démarche, une autre solution, une autre façon de traiter le problème. Cette narration du monde sera supplantée par une autre, celle de la mondialisation néolibérale. D’où Il s’agit de comprendre et de réagir utilement à la mondialisation en cours dans le monde contemporain. Vue sous l’angle philosophique, la mondialisation néolibérale apparaît comme un stade historique, une époque historique, une phase historique nommée le « Capitalisme à la place de l’État ». Propulsée par l’idéologie néolibérale (le postulat selon lequel la libre circulation des biens et services, des capitaux et de l’information produira  un résultat optimal en terme de croissance économique et de bien-être humain), la mondialisation constitue un « tournant de civilisation » opérée par la Révolution conservatrice de M. Thatcher et de R. Reagan prônant le primat du Marché sur l’homme, la politique, l’environnement et l’État, et légitimant l’omnimarchandisation. Ainsi, y a-t-il un nouveau mode de production composé de nouvelles forces productives et de nouveaux rapports sociaux de production. Le bonheur de l’homme se trouve dans le marché. Autrement dit, le monde sera meilleur et heureux, seulement et seulement si le monde est un marché. De ce fait, « le sens actuel de l’histoire des sociétés contemporaines est celui de l’évolution nécessaire, inexorable et inévitable vers la constitution d’un grand marché mondial unique, intégré, autorégulateur, The Single Market Place, dira R. Petrella. Le sujet de cette histoire n’est rien d’autre que l’ensemble des acteurs de la mondialisation néolibérale dont les principaux sont l’État, les Firmes transnationales (FTN) et les Firmes multinationales (FMN), les Organisations internationales, en l’occurrence le FMI, la Banque mondiale, l’OMC, et l’ONU, les Organisations régionales dont l’UE, l’UA, l’Alena, le Mercosur, l’OTAN, la SADC, les Investisseurs privés et publics. Toutefois, suite à ses effets négatifs, je crois que la mondialisation constitue un obstacle de taille au bonheur de la plupart de l’humanité, de ces centaines de millions de personnes qui subsistent avec l’équivalent d’un Euro par jour. De ce fait, cette narration du monde est devenue un métarécit. Et l’Altermondialisme est apparu comme un rayon d’espoir, une porte de sortie possible. Je pensais que le slogan bien connu de ce mouvement (« Un autre monde est possible ») identifiait une porte de sortie ouverte par la voie d’une alternative économique ( solidaire et durable, ), politique (démocratie participative à la Porto Alegre) contraire à l’idéologie mondialiste néolibérale prédominante. Prônant une autre mondialisation où la personne humaine et le respect de la nature sont au cœur de l'économie et de la politique, l’idéologie altermondialiste est charriée par la Charte des principes du Forum Social Mondial (FSM) modifiée et approuvée par le Comité international du FSM le 10 juin 2001. Vivant la dialectique de l’Unité (l’Un) et de l’Hétérogénéité (le Multiple) en son sein, l’Altermondialisme professe l’humanisme et propose une éthique (où le défi humano-écologique fait l’objet) et se présente comme un nouveau paradigme, « le paradigme altermondialiste » qui inspire les discours et les combats altermondialistes. Cependant cette narration du monde semble s’essouffler suite à ses contradictions internes et se transforme en un métarécit.

La postmodernité, en ses différentes utopies, se présente comme une époque émergente et ne peut être comprise que par rapport à la Modernité définie sous son triple sens : le Projet moderne, l’universalisme et l’émancipation humaine. Une fois la Modernité comprise dans son essence, celle de l’Individu comme Sujet donnant sens à l’être de l’étant en tant que tel, ses caractéristiques (une conception du Sujet, puissance à la Raison, une conception de l’Histoire et de l’Idée du progrès) seront attaquées par la Postmodernité qui constatera l’échec du Projet moderne et dont les racines sont d’ordre scientifique, politique, économique, culturel et philosophique. De ces racines émergent les caractéristiques de la Postmodernité, à savoir la fragmentation de l’identité individuelle, le néo-tribalisme, le primat de l’image, le rejet de l’Histoire linéaire et de l’Idée du progrès, l’apologie du présentéisme, l’Éthique de l’Instant, le mépris du politique, la transfiguration de l’idéologie, la relativisation de la science et de la vérité. Nommée Hypermodernité par Gilles Lipovetsky, la postmodernité sera traitée de culture du capitalisme tardif par Frederic Jameson et elle est décriée par Gilles Lipovetsky, car elle est L’ère du vide, de  l’individualisme contemporain, L’empire de l’éphémère, de La mode, de la consommation, etc. Autrement dit, la Postmodernité (Michel Maffesoli) /Hypermodernité (Gilles Lipovetsky) est une narration du monde se transformant en métarécit.

Philosophe engagé dans ce monde, je voulais à la fois savoir pourquoi les remèdes apportés jusqu’ici n’ont pas marché pour rendre l’homme heureux et me rendant parfaitement compte de l’immensité du projet, j’essaie de porter jugement sur ce qui a déjà été fait afin de discerner le chemin à suivre. Ainsi je mobilise une forme de philosophie que juge potentiellement utile en pratique afin de transformer le monde et je m’engage à penser autrement la manière d’habiter le monde pour parvenir à élaborer une nouvelle philosophie de l’histoire qui favorise l’avènement d’un « autre monde possible plus juste » qui sera actualisé par un modèle démocratique participatif et prosôponiste basé sur un nouveau paradigme, à savoir le paradigme de la rencontre. Il est donc question d’une vision historique qui puise ses forces dans la capacité philosophique d’intervenir, non seulement dans le débat en cours, mais aussi et surtout dans le monde de tous les jours. Cela étant dit, je me mets sur les traces de Socrate qui prônait le rôle de la philosophie dans la cité et je crois que la philosophie, du moins une certaine philosophie, est indispensable pour la vie de la cité. Ainsi j’ai cherché des éléments pouvant m’aider à contribuer au renouveau de la philosophie de l’histoire. Et je propose la philosophie de la rencontre. Voilà ma Nouvelle narration du monde qui sera à la source d’un nouvel humanisme propre à notre ère planétaire, de l’éthique planétaire pour notre histoire et de nouvelles conceptions de la politique et de l’économie. De ce fait, j’ai trouvé un nouveau moteur de l’histoire. Ce dernier est la lutte pour la reconnaissance mutuelle en vue d’un monde meilleur. Quant au sens de l’histoire, je l’ai découvert dans la construction d’un autre monde possible plus juste à actualiser par la démocratie participative et prosôponiste basée sur le paradigme de la rencontre. C’est celui-ci qui organise mon discours sur cet autre monde possible plus juste.

Tout lecteur de mon ouvrage aura à se rendre compte que je présente une étude très fouillée et actuelle sur le Matérialisme historique, la Mondialisation, l’Altermondialisme, la Modernité et le Postmodernité.

Et je partage l’idée de mon préfacier, Tom Rockmore, Professeur Émérite de Duquesne University et Professeur à l’Université de Pékin, selon laquelle à la fin de mon étude, je reviens vers Hegel, un Hegel revu et corrigé à la lumière du goût du jour, mais Hegel quand même, celui dont Marx est parti dans les années 1840 en pensant dépasser le monde moderne pour un nouveau monde possible et surtout meilleur que celui dans lequel nous vivons. Et il poursuit : « Mpala, qui semble penser que le moment marxiste a vécu, est conscient des difficultés auxquelles le Matérialisme historiques a toujours mené. Afin de changer le monde, il change donc de paradigme en revenant au-delà du Marxisme à ses sources dans la tradition philosophique allemande. Hegel nous lègue deux idées de la plus grande importance, idées dont la tension permanente encadre en quelque sorte l’énigme complexe du monde moderne. Il y a, d’une part, l’analyse célèbre du rapport dialectique entre le maître et l’esclave. Or Hegel qui pensait que la philosophie n’arrive que trop tard, serait peut-être surpris de constater sa propre influence. Il n’est pas faux de dire que ses adeptes se confrontèrent sur le champ de bataille à Stalingrad. Son analyse du rapport entre le maître et l’esclave est souvent en question dans les mouvements de libération de nos jours. Il y a aussi, d’autre part, le concept d’identité puisé dans l’analyse épistémologique. Ce concept fonde pour ainsi dire la théorie hégélienne du monde moderne. Or selon le penseur berlinois, l’individu trouve son développement social ultime dans l’état moderne. Il n’y a donc aucun besoin de s’engager dans une révolution dont le résultat prévisible ne serait pas meilleur mais pire que la situation actuelle. Pourtant, la tension entre ces deux aperçus est palpable. La lutte de la reconnaissance suggère une situation révolutionnaire, ce que le concept d’État en tant que site de la reconnaissance de l’individu tend à nier. Si l’on ne peut atteindre la reconnaissance qu’en transformant le monde contemporain pour créer un monde nouveau, alors on ne pourra se passer d’une révolution. Mais s’il est possible de se reconnaître dans le monde moderne, le monde tel qu’il existe, ou encore en le réformant de quelque façon que ce soit, alors la réconciliation entre les hommes, ou bien la réconciliation de l’homme avec lui-même pourra s’accomplir en aménageant l’État actuel sans le détruire. Mpala, qui semble plus enclin à la réforme qu’à la révolution,  appelle de ses vœux un monde nouveau dans lequel il sera possible de construire une démocratie participative qui à l’heure qu’il est fait souvent et très cruellement défaut. Espérons que l’histoire lui donnera raison car le monde contemporain en a vraiment besoin! » Voilà qui est dit et qui m’anime. Mais je tiens à souligner que cette Nouvelle narration du monde exige que l’ONU soit remplacée par la Communauté Des Nations- CDN en sigle. Si l’ONU a pu remplacer la Société des Nations-SDN, elle n’est plus viable en ces jours où elle est sous l’emprise de certains États dont le droit de veto la rend  une Organisation des Nations Désunies.et de ce fait, certaines de ses résolutions ne seront jamais contraignantes. Avec la CDN excluant un Conseil de Sécurité et restaurant l’égalité des États, l’Assemblée Générale aura des résolutions contraignantes.

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