Professeur Abbé Louis Mpala

dimanche 28 août 2022

Ce livre est un fruit de notre équipe de travail au sein du Département de Philosophie de l’Université de Lubumbashi. Nous avons voulu mettre en exergue certains éléments de la culture bemba.

Le texte du Professeur Louis Mpala propose une philosophie de l’existence authentique en partant des écrits du Salésien et chercheur Père Léon Verbeek qui a consacré une grande partie de sa vie à récolter et à transcrire la tradition orale de la zone bembaphone du Sud-Est Haut-Katangais de la république Démocratique du Congo. De ses écrits, Louis Mpala Mbabula tire une anthropologie philosophique qui fait du Muntu un Homo cantor.

Le Doctorant Richard Lubembo Mulamwa Kabeke, de par son texte portant sur la Mélopée comme dévoilement du sens de la mort, renforce la thèse de l’Homo cantor. Il donne la quintessence de la mélopée dévoilant le sens de la mort, passage obligé de tout être humain. En outre, il fait voir que la mélopée répond à un style approprié et elle a ses « spécialistes », les Kilolo,  les pleureuses, ces femmes qui ont le talent d’émouvoir les gens se trouvant au deuil et au cimetière. Elles transmettent toute une tradition des chansons funèbres.

L’Assistant Raymond Mbeka Mwamba s’appesantit sur L’éducation par la parémiologie chez le peuple bemba. De ce fait, il parle de l’Homo educandus, l’homme qu’il faut éduquer afin de devenir Homo sapiens. L’homme, toujours à la recherche de la sagesse, est à éduquer et il existe plusieurs moyens d’éducation dont les proverbes.

Provenant du verbe latin ex-ducere, signifiant conduire de… vers…, éduquer, étymologiquement, veut dire faire passer d’un état à l’autre, d’un esprit à l’autre. En effet, les proverbes, sous tous les cieux, vont l’au-delà de l’instruction qui est « la transmission de savoirs et de savoir-faire. Elle utilise des méthodes d’apprentissage »[1]. La confusion entre éducation et instruction proviendrait, peut-être, de nos jours, à l’appellation donnée de par le monde à nombre de « Ministères de l’éducation »[2]. Cependant l’éducation concerne « l’éveil et le développement des potentialités de l’être humain et sa relation à lui-même, aux autres et au monde »[3]. Toutefois, Elena Cardinali complète Marie-Andrée Bertin en précisant que ces potentialités, facultés ou attitudes à réveiller et à développer, sont « déjà inhérentes en nous »[4]. Et puisqu’il en est ainsi, de l’éducation, Mahatma Gandhi renchérit en affirmant que « la vraie éducation consiste à faire venir à la lumière le meilleur d’une personne »[5]. A notre avis, ce qu’il y a de meilleur en l’homme est son aspiration à devenir plus, à être plus tout en étant mieux.

Pour que cette aspiration se concrétise, l’éduqué ne sera pas un agent. « L’agent désigne le rouage d’une machine ; il est agi par la finalisation du système ; on lui demande d’avoir des compétences et de ne pas trop penser ; c’est un sujet-agi »[6]. Il n’est pas non plus acteur. Ce dernier se caractérise « par son intentionnalité ; il a des stratégies, est pourvu de conscience et d’initiative. Il a des projets et entrevoit la possibilité d’un changement. S’il est déjà un sujet, il reste néanmoins un exécutant (donc il reste agi) : il interprète sa participation, il joue un rôle mais il n’est pas créateur. Il ne finalise pas lui-même ; il complète la finalisation des autres »[7]. Au contraire, il est appelé à devenir ou à être auteur. Un auteur est « la véritable origine de l’action. Celui-ci projette ses fins et induit le problème de la responsabilité en éducation. Etre auteur, c’est vouloir se situer explicitement au fondement de ses actes. L’intentionnalité est ici pleinement présente. Il s’agit de s’autoriser à, de se donner l’autorisation. C’est ici qu’on peut véritablement parler d’initiateur ou de sujet-créateur, car il  se reconnait la légitimité et la nécessité de décider de certaines choses lui-même »[8]. C’est cela, en fait, que vise l’éducation traditionnelle à travers les proverbes.

De ce qui précède, l’on saura pourquoi ce livre se veut une contribution à la Philosophie de la culture « comme mémoire, conscience et sentinelle de l’humanité »[9].

Les différentes chansons exécutées selon (et dans de) les différentes circonstances de la vie et les différents proverbes évoqués selon(et dans de)  les différentes circonstances de la vie font partie de la mémoire collective d’un peuple donné, en prendre conscience exprime l’authenticité ou la congruence humaine (savoir s’assumer et être courroie de transmission de sa culture) et en faire une sentinelle de son identité culturelle ouvre l’esprit pour découvrir des dénominateurs communs ou des invariants culturels entre différentes cultures et ainsi faire de la diversité culturelle une richesse.

Philosophie de la vie, la philosophie de la culture a certaines tâches comme celles «  d’aider l’homme à prendre conscience de sa vie et de son identité qui s’édifient sur la vie et l’identité culturelles à  partir des évidences ordinaires de nos vies relationnelles et intersubjectives au sein d’une culture »[10] et de « contempler le caractère fondamentalement symbolique de la vie qui, dans son auto-symbolisation, évite de s’enfermer dans des cultures particulières qu’on pourrait comparer aux monades sans fenêtres  de Leibniz »[11].

En publiant ce livre, nous ne voulons pas être des monades sans fenêtres, mais nous sommes au rendez-vous-du donner-et-du-recevoir.



[1] M.-A. BERTIN, L’éducation prénatale naturelle. Un espoir pour l’enfant, la famille et la société, troisième et nouvelle édition, Paris, Editions du Dauphin, 2012, p. 25.

[2]Ibidem, p. 25.

[3]Ibidem, p. 25.

[4] E. CARDINALI, Che cos’ è l’educazione prenatale, Roma, Nuova edutrice, s.d., p. 1.

[5] M. K. GANDHI, Antiche come la montagne, Milano, s.e., 1983, p. 203. Nous   soulignons.

[6] J.-P. POURTOIS et H. DESMET, L’éducation postmoderne, Paris, PUF, 2016, p. 306. Nous soulignons.

[7]Ibidem, p. 306. Nous   soulignons.

[8]Ibidem, p. 306. Nous soulignons.

[9] J.C. AKENDA Kapumba, « Philosophie et valeurs culturelles africaines. Identité culturelle africaine et universsalisme éthique. Tâches pratiques d’une philosophie de la culture », dans Philosophie africaine. Bilan et perspectives,  Kinshasa, Facultés Catholiques de Kinshasa, 2002, p.170 (p.141-173). Souligné par l’auteur.

[10] Ibidem, p.171-172

[11] Ibidem, p.172. Souligné par l’auteur.

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Résumé

Notre approche prosôponiste comme philosophie de la rencontre fait du Sein Maternel le premier lieu de la RENCONTRE, espace anthropologique délicat, entre le Fœtus et le monde interne (Fœtus-maman, fœtus-papa) et externe (fœtus-familles restreinte et étendue, fœtus-famille/Communauté culturelle/Société politico-économique). D’où l’éducation commencera par la dialectique action-réaction sur, avec et par le fœtus. De ce fait, la femme, comme le « berceau d’une nouvelle humanité » (F. Schmidt), est à protéger contre toutes formes de violences, de traumatismes, etc. Il y va de l’avenir de notre humanité (être humain et monde humain). Pour ce faire, tout un arsenal méthodologique, pédagogique, sapiential, écologique et sanitaire sera envisagé. Sans être une destination, l’éducation prénatale naturelle à la paix est un processus se poursuivant, après la naissance, dans d’autres cadres (école maternelle-secondaire, université, église, associations sportives, etc. Tout doit concourir à la « paix positive ». Notre approche se veut une des contributions montrant à la mouche la voie de sortie de la bouteille (L. Wittgenstein 2).

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